29 juin 2018

Actualités

Le lycée numérique : état des lieux en fin d’année (article de presse)

Tandis que la Région Grand Est annonce que 62 nouveaux lycées, dont 14 en Alsace, sont prêts à se lancer dans le tout numérique à la rentrée, des représentants de syndicats enseignants et de parents réclament un bilan contradictoire.
La révolution du lycée 4.0 connaît encore quelques bugs.
Tandis que la Région Grand Est communique sur la deuxième vague des établissements prêts à se lancer dans le tout numérique à la rentrée, le syndicat enseignant Snes-FSU, les représentants des parents de la FCPE et de la Peep déplorent l’absence d’un « bilan sincère et contradictoire de l’expérimentation ». D’un commun accord, ils ont boycotté l’instance du 21 juin, un CAEN (conseil académique de l’éducation nationale) qui ne présentait toujours pas ce point à l’ordre du jour.

« On ne nous consulte pas »
« Le rectorat nous avait assuré qu’il y aurait des comités de suivi et de pilotage. Il n’y en a jamais eu. Nous ne sommes que des exécutants de seconde zone, on ne nous consulte pas, on ne nous informe même plus  », soupire Jean-Louis Hamm, co-secrétaire académique du Snes-FSU. Ce, alors même que le prochain plan de formation des personnels prévoit du numérique « au regard des premiers éléments de bilan… qu’on n’a pas trouvé bon de nous communiquer ».
Les parents d’élèves, qui ont, eux, été reçus à plusieurs reprises par la Région, et devaient l’être à nouveau hier, ne sont pas plus avancés. « Quels ont été les écueils et les réponses apportées ? Qui n’utilise pas le matériel et pourquoi ? » aurait notamment voulu savoir Florence Claudepierre, présidente haut-rhinoise de la FCPE. « On se pose beaucoup de questions, renchérit Juliette Staraselski, son homologue de la Peep Alsace. On aurait voulu que toutes les parties concernées soient écoutées, y compris les élèves élus. Il n’y a pas de vue d’ensemble, on nous dit que c’est trop tôt… »

C’est que la mise en place des livres numériques a été retardée au minimum d’un trimestre, du fait de la faiblesse des infrastructures wi-fi, mais aussi de la difficulté à télécharger les contenus. « À la fin, les élèves n’avaient pas le réflexe de les utiliser ou ils galéraient. C’est un handicap supplémentaire pour les plus faibles et pour ceux qui habitent en zone blanche », détaille Jean-Louis Hamm.
«  Il n’y a eu aucune réflexion, regrette Xavier Schneider, président de la FCPE du Bas-Rhin. La Région n’a jamais pris en compte les études sur le livre numérique. Elle y est allée à fond, au lieu de faire des tests. » Des comités de suivi ont été mis en place dans certains établissements et les proviseurs concernés se sont retrouvés récemment pour établir un bilan avec les référents 4.0 de l’académie, mais là encore, en l’absence des représentants des enseignants et des parents.

Pas forcément un plus pédagogique
Ce faisant, le Snes-FSU a réalisé sa propre enquête d’où il ressort, entre autres, qu’outre ses limites techniques, le manuel 4.0 n’apporte pas forcément un plus pédagogique par rapport à sa version papier. « L’interactivité tant louée est quasi nulle. » Le matériel et les interfaces étant variés, les difficultés d’usage persistent, des élèves en profitant pour s’évader sur le web dans « une nouvelle forme d’école buissonnière ».
Plus largement, on observe que l’intérêt du numérique en classe passe par de nouvelles formes d’apprentissage et d’autres logiciels pour lesquels les profs motivés n’ont pas eu de formation…
Ceux qui réclamaient un moratoire constatent aujourd’hui que la situation n’en est pas loin. « L’engagement des lycées pour la rentrée, d’un tiers de moins que ce qui était présagé, est bien le signe qu’il y a un problème », analyse la FCPE. Parmi les volontaires, le Snes-FSU note qu’il y a des établissements privés ainsi que du secteur professionnel et agricole, où l’usage des manuels est moins systématique, et « très peu de lycées publics de l’enseignement général  ».
La liste vient à peine d’être connue, ce qui, pour Florence Claudepierre, démontre une nouvelle forme d’impréparation. « Le matériel, les prix, les aides seront-ils les mêmes ? On le suppose… Les lycéens ne sont plus dans les établissements et il va falloir informer les familles qui doivent préparer leur budget. Certaines découvriront cela en août. Ce seront les mêmes problématiques que l’an dernier, des retards de livraison… Je ne pensais pas, après tout ce qu’on a dénoncé, qu’on en serait à nouveau là. »
Catherine Chenciner (Ll’Alsace – DNA)

https://www.lalsace.fr/actualite/2018/06/29/la-liaison-est-mauvaise-sur-le-lycee-4-0